dimanche 24 février 2013

Le Livre du Dimanche Soir

« Je confesse que je suis un touriste apathique, et même décourageant ; j'attends que les choses retiennent mon attention, qu'elles me raccrochent, qu'elles me fassent de l'œil. » En cette année 1949, Henri Calet fonctionne comme à son habitude, à savoir : à contretemps. Il endosse une fausse identité – journaliste spécialisé dans l'industrie du gaz ! –, se fait inviter à des colloques où il n'entend rien, et profite ainsi de l'Italie, « à la paresseuse ». Il arpente Rome, Venise, à la recherche de femmes superbes, succombe au charme des apéritifs au goût amer et se métamorphose en pilier de bistrot, flâne dans des ruelles mal famées du côté du palais Farnèse quand il faudrait courir visiter le Panthéon, s'encanaille by nigth dans les casinos du Lido, frémit dans les labyrinthes vénitiens, s'affole sur le Grand Canal. Il monte à bord « d'un petit vapeur (vaporetto) surchargé de monde. Nous étions serrés les uns contre les autres, ainsi que dans le métro aux heures de pointe, ce qui m'empêchait de m'extasier de façon convenable devant les palais que mon ami nommait au passage ».
L'auteur de La Belle Lurette, plus fripon que jamais, se délecte des petits riens au hasard de ses chemins buissonniers et laisse courir ses phrases coquines sur les « via », les « calle », et même sur les « Vespa ». Il conclut : « Ce qui rend les voyages à peu près inutiles, c'est que l'on se déplace toujours avec soi, avec les mêmes pensées, le même passé, les mêmes ennuis. Où que l'on se trouve, on n'est jamais seul. » La solitude à la Calet, ou le plaisir d'écrire au fil d'aventureuses balades.

Télérama 4/07/2009

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